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Repas gratuits, cours de sport, crèches… Tout ce que les salariés ont à perdre avec le télétravail

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Le classement des meilleures entreprises où travailler « Great place to to work », évalue depuis 1998 la satisfaction des employés par rapport à leurs employeurs, selon trois critères : la confiance des employés en leurs dirigeants, le sens qu’ils trouvent à leur travail et la camaraderie entre collègues.

Ce type de classement est devenu une norme dans de nombreuses industries lorsque les entreprises tentent de convaincre des candidats de travailler chez eux.

L’importance d’une bonne « marque employeur » (c’est-à-dire l’image d’une entreprise auprès de ses employés et des candidats potentiels) est devenue encore plus évidente face à la génération « millennials » – regroupant les personnes nées entre 1981 et 1996 – sensible aux avantages et aux services qu’un environnement de travail peut leur offrir.

Ainsi, peut-on lire dans une enquête faite aux États-Unis que 48 % de ces millennials prennent en considération la disponibilité des snacks à volonté au moment de choisir un employeur. Dans une autre étude, 26 % des personnes interrogées disent que les services dans les espaces de travail sont un moyen efficace de retenir le personnel. Les services les plus appréciés étant, par ordre d’importance, la salle de sport, les repas, les massages sur place et les salles de repos.

De fait, des études académiques montrent que de bonnes conditions de travail ont un réel impact sur la motivation, la santé, la productivité et la performance des salariés.

Délocalisation complète du lieu de travail

Depuis de nombreuses années, les possibilités offertes par les outils digitaux ont fait apparaître de nouvelles problématiques et ouvert un débat essentiel lié au télétravail : la réflexion sur la sphère privée et la sphère professionnelle.

Dans le secteur privé, il y a eu une première ouverture vers la digitalisation pour des activités indépendantes pouvant être externalisées, comme les services de traduction, de conception ou services clients.

Plus tard, des entreprises ont progressivement mis en place des dispositifs de télétravail permettant aux employés menant des activités dont la présence physique n’était pas indispensable quotidiennement de travailler certains jours à distance.

Cette ouverture a permis de réaliser des gains dans trois domaines : premièrement, des économies financières ; deuxièmement, une réduction de l’impact écologique des activités de l’entreprise ; et enfin, une satisfaction croissante des employés, qui ont apprécié le surplus d’efficacité personnelle produit par le télétravail.

Afin d’accompagner ce mouvement vers un modèle hybride de travail, des gouvernements successifs ont dû créer des réglementations et législations jusqu’aux ordonnances Macron dès 2017, qui encadrent et facilitent la transition vers le télétravail. Trois ans après son démarrage, ce cadre juridique avait montré son efficacité au niveau du nombre d’employés en télétravail.




À lire aussi :
Avec les ordonnances Macron, le grand retour du télétravail


La mise en place dans un grand nombre d’entreprises d’un modèle 100 % virtuel forcé par les mesures de confinement, est venue montrer tant aux acteurs publics qu’aux acteurs privés qu’il existe une possibilité pour un modèle 100 % digital sur la durée : d’une part, les craintes des entreprises, en matière de pannes et perturbations se sont avérées infondées, d’autre part de nombreuses personnes ont apprécié ce nouveau modèle de travail et un grand nombre d’entre elles a montré sa volonté de continuer sur ce même modèle après le confinement.

Cela s’est révélé très rapidement dans les nouvelles des entreprises. Facebook a été l’un des premiers à annoncer qu’il fallait s’attendre à ce que 50 % des employés travaillent à distance au cours des 5 à 10 prochaines années. Au Japon, Fujitsu a annoncé la fermeture de la moitié de ses bureaux avant 2022. En France, PSA a annoncé son intention d’avoir 40 000 salariés en télétravail.

Où est le piège ?

Dans cette nouvelle dynamique, nous pouvons nous attendre à ce qu’à l’enthousiasme associé aux gains de temps de transport, de confort et de la possibilité de passer plus de temps à la maison succède tôt ou tard la prise de conscience de nombreux avantages perdus.

De leur côté, les entreprises risquent, si elles n’y prennent garde, de perdre une certaine capacité de contrôle de leurs employés, la perte d’opportunités pour nourrir la culture d’entreprise ainsi que la perte des nouvelles offres commerciales.

Pour le travailleur, il y a une conséquence plus pertinente, susceptible de passer inaperçue : la perte des services que proposent les entreprises dans leurs locaux. Ces services qui permettent non seulement la création et le maintien d’une culture d’entreprise, mais sont aussi une ressource très appréciée par les employés, sensibles à des avantages concrets, hors d’un système de rémunération et d’avantages sociaux.

Attardons-nous sur quelques-uns de ceux qui sont proposés ces jours-ci par les entreprises françaises et qui encouragent le sentiment de satisfaction et d’engagement : BlaBlaCar propose à ses employés un échange de bureau où ils peuvent aller travailler pendant une semaine dans un bureau à l’étranger. Deezer a un studio de musique entièrement meublé. ManoMano met à disposition de ses employés un atelier où ils peuvent apprendre le bricolage. À Ubisoft, il y a une ludothèque alors que Frichti propose un délicieux repas et des goûters tous les jours. Tous ces services ne peuvent pas exister dans l’environnement virtuel !

Capture d’écran d’une page du site de l’entreprise ManoMano présentant les différents avantages offerts aux salariés.
Site web.

Cela signifie que les entreprises qui ont la volonté de passer en mode entièrement virtuel doivent, dès à présent, faire évoluer leur offre de services pour la « délocaliser ».

Si un employé est à la maison toute la journée, il sera obligé d’arrêter de travailler pour préparer un repas, ce qui peut prendre une partie du temps du travail, s’avérer malsain selon le type de repas choisi, et même coûteux. Cet employé est susceptible d’avoir une vie plus sédentaire et d’éviter de bouger pour aller prendre une tasse de café avec des collègues. De plus, il peut perdre des opportunités d’acquérir des avantages qui vont au-delà d’un salaire ou d’une rémunération et qui pourraient l’aider à mieux s’intégrer dans la dynamique de l’entreprise, par exemple, des moments d’intégration, des cours et formations, du mentorat et de l’accompagnement.

Reconstruire l’offre de services ?

Cela pose un nouveau défi aux entreprises. Comment reconfigurer les services dans un environnement de bureau délocalisé et confondu avec le lieu de détente ?

Repas, snacks, salle de gym, fournitures, haut débit, laverie, crèche, concierge, messagerie… la liste des services fournis au sein d’un espace de travail commun peut être longue, il va falloir être créatif pour compenser ces services dans un mode de travail disséminé !

Une employée d’une crèche d’entreprise Babilou joue avec des enfants.
Jean‑Pierre Muller/AFP

Mais ce nouvel environnement s’avère riche en potentiel service et stimulant pour des structures entrepreneuriales et innovantes souhaitant reconstruire une offre de services qui leur permettrait de devenir ou se maintenir comme l’employeur de rêve pour les générations actuelles et futures.

Le domicile constitue-t-il vraiment le meilleur endroit pour travailler ensemble (ce qui est le fondement d’une entreprise) sans se côtoyer ? Les créateurs de services devraient s’interroger sur ce point et sur les manières d’engager et de motiver les employés.

Vous pensez que travailler à domicile est une bonne chose ? Vous imaginez travailler une semaine par an dans un endroit paradisiaque ? Vous souhaitez vous former pour être professionnellement performant sans renoncer à votre cours de yoga du mardi midi ? Quelque part, une entreprise est peut-être déjà en train de se demander comment rendre tout cela possible pour vous séduire… et certainement aussi car elle soupçonne que cela vous rendrait encore plus performant.


Cet article a été co-rédigé par Stéphane Compain-Tissier, directeur adjoint d’un hôtel.

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Fernanda Arreola, Professor of Entrepreneurship & Innovation @ EMLV, Pôle Léonard de Vinci – UGEI

Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons.

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